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Bouddhisme au féminin - Partageons nos aspirations, nos questionnements, nos compréhensions

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Quatre femmes remarquables

En relation avec le thème du magazine "l'argent et nous", célébrons quatre femmes remarquables,

généreuses et courageuses qui ont su utiliser l'argent pour aider les autres.

 

Maria Nowak

 

Depuis vingt cinq ans, elle ne prête pas seulement de l’argent, elle donne de l’espoir et de la dignité aux illettrés, chômeurs, RMistes. Cette Polonaise, qui à 12 ans dut recommencer sa vie de zéro en France, a puisé sa volonté, son humanisme dans une tragédie. Cet acharnement de Maria Nowak à redonner une dignité et une existence aux plus démunis n’est pas un hasard. Elle est elle-même entrée clandestinement en France, en 1947, à l’âge de 12 ans. Sans papiers, sans travail, sans argent, sans parler le français, elle et sa famille ont fait l’expérience des petits boulots, de l’humiliation de ne pas être reconnus comme des être humains à part entière.

"Je suis bien évidemment très sensible à tout ce problème d’immigration, ce problème de sans-papiers. Je le sens dans mon passé, dans la façon dont je l’ai vécu moi-même. Je pense que ce n’est pas seulement injuste, mais parfois contraire au bon sens de ne pas accueillir des gens qui sont pleins d’idées, pleins d’énergie.
Lorsqu’on est au chômage ou au RMI, la pire des choses, c’est de rester passif, de ne pas bouger. Rester simplement assis sur sa chaise et toucher les allocations familiales et le RMI, c’est une solution invivable. Le but premier d’une politique sociale devrait être d’aider les gens à s’insérer.
On ne peut modeler les gens à sa façon, c’est eux qui sont acteurs de leur propre développement et c’est peut-être ce que j’ai appris ici, à Madina Dian [en Guinée], et qui a été pour moi le plus précieux.
Ce que je voudrais que l’on retienne de notre action, du microcrédit en général, c’est qu’il change le regard sur les gens à travers le monde. Les riches voient les pauvres comme des êtres inférieurs, ils ne voient pas leur intelligence, leur créativité, leur énergie.
Quand on est dans une sorte de tragédie totale, il n’y a que le mouvement qui sauve. Si on ne bouge pas, si on ne fait pas quelque chose, on se laisse emporter par la désolation.
Le droit d’entreprendre est un droit fondamental."

Maria Nowak est née en Pologne en 1935. En 1943, elle fuit la Pologne occupée par l'armée nazie qui incendie sa maison, fusille ou déporte sa famille. Elle s’installe en France en 1946 avec une partie de sa famille. Diplômée de l'Institut d'études politiques de Paris (1956) et de la London School of Economics (1959), elle entre à la Caisse centrale de coopération économique, qui deviendra l’Agence française de développement, où elle se spécialise sur l’Afrique. Elle devient directrice des politiques et études.
En 1985, Maria Nowak rencontre un économiste bangladais, le Pr. Yunus, fondateur de la Grameen Bank et futur prix Nobel de la paix (2006). Elle décide de transposer en France ce modèle de microcrédit pour « donner une chance aux exclus. En 1989, elle fonde l'Association pour le droit à l'initiative économique (Adie) dont elle devient présidente.
En 1991, elle est détachée à la Banque mondiale à Washington pour participer au développement des programmes de microcrédit en Europe centrale. Elle devient également cofondatrice du Centre de la microfinance de l'Europe centrale et orientale.
En 2003, elle constitue le Réseau européen de la microfinance (REM) et en devient également la présidente, poste qu'elle occupe jusqu'en 2008.

Ouvrages de Maria Nowak:

1 - La banquière de l'espoir

2 - Le microcrédit ou le pari de l'homme

3 - On ne prête (pas) qu'aux riches : La révolution du microcrédit :

L'affirmation " on ne prête qu'aux riches " a fait son temps. Le succès du microcrédit le prouve. Dans le monde, 60 millions de personnes sont sorties de l'exclusion et de la misère grâce au microcrédit. En France, des milliers d'entreprises ont été créées grâce à des prêts qui ne dépassent pas 5 000 euros. Quand on prête de l'argent aux exclus du système bancaire, non seulement ceux-ci retrouvent le goût de l'initiative et la confiance en eux-mêmes, mais ils remboursent mieux que les autres. Prêter aux démunis ne relève plus de la charité publique mais de l'activité financière. Pour y arriver, les militants de la microfinance ont dû briser d'extraordinaires préjugés. Aujourd'hui, cette nouvelle perspective - et sa réussite - permet de sortir du débat sans issue opposant un État providence, qui n'est pas en mesure de protéger tout le monde, à la logique brutale du capitalisme.

 

Voir aussi l'interview de solidaires du monde (avec vidéos ):

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Ela Bhatt, fondatrice de SEWA :

 

"Les femmes, en s'organisant entre elles, ont abandonné l'acceptation passive de toutes les injustices; elles ont le courage de se lever et de se battre, la capacité de penser, d'agir, de réagir et de gérer. L'autonomie est ce qu'elles veulent en définitive. Il n'y a pas de développement sans autonomie. Mais il n'y a pas de route vers l'autosuffisance, sans organisation."

Ela Ramesh Bhatt née le 7 septembre 1933 dans la ville d'Ahmedabad, (Etat du Gujarat), Inde), est une juriste indienne. Elle a reçu de nombreuses distinctions au niveau international pour l'ensemble de son œuvre auprès des plus démunis, qui sont le plus souvent des femmes.

Née dans une famille de brahmanes privilégiés, l'enfance d'Ela Bhatt se passe dans la ville de Surat  où son père, Sumantrai Bhatt, a un cabinet d'avocat prospère. Sa mère, Vanalila Vyas, est active dans le mouvement des femmes. Ela entre au Sir Shah LA Law College à Ahmedabad. En 1954, elle obtient son diplôme en droit et une médaille d'or pour son travail sur la loi hindoue. Elle commence à travailler comme avocate au bénéfice du syndicat d'une entreprise textile.

En 1956, Ela Bhatt épouse Ramesh Bhatt (aujourd'hui décédé), mari qu'elle a choisi.

Elle créé à Ahmedabad le mouvement SEWA (Self-Employed Women’s Association, ), pionnier de la microfinance, mais surtout mouvement atypique à la fois syndicat, coopérative et banque pour des centaines de milliers de femmes. Ce syndicat au profit des plus pauvres a désormais 1 million de membres.

En 1979, elle fonde la Women's World Banking avec Esther Ocloo et Michaela Walsh, organisme dont elle assure la présidence de 1980 à 1998. Dès 1981, elle se spécialise dans la défense des femmes, en particulier celles gagnant leur vie dans le secteur informel (ramasseuses de chiffons, vendeuses de légumes, porteuses d'eau, tireuses de charrettes...), et qui, à ce titre, ne bénéficiaient d'aucun droit ni protection légale.

Jusqu'en 2005, elle est présidente du Comité directeur WIEGO,un réseau mondial de recherches politiques qui vise à améliorer la situation des travailleurs pauvres, surtout celle des femmes dans l'économie informelle..

Ela Bhatt vit modestement à Ahmedabad avec sa famille, dans un petit bungalow exigu et spartiate. Son lit lui sert en même temps de fauteuil de bureau... Elle est actuellement présidente de la Banque coopérative de SEWA, de HomeNet, et de l'Alliance internationale des vendeurs de rue.

Elle fait partie du groupe des Global Elders (anglais signifiant les anciens, ou sages, universels), créé par Nelson Mandela afin de promouvoir la paix et les droits humains dans le monde.

lire aussi : l'Inde la révolution par les femmes

 

 

 

Madjiguène Cissé

Flamme du Sénégal

 

A bientôt soixante ans (elle en paraît vingt de moins!), cette professeur d'allemand sénégalaise continue de militer. Après avoir animé le combat des sans-papiers en France (1996-2000), Madjiguène Cissé se bat pour la créationd'une «cité des femmes » à Dakar grâce à un réseau d'épargne collective.

Grandir dans une famille pauvre d'une banlieue de Dakar apprend vite la réalité de la vie. «Comme j'ai eu la chance d'aller à l'école, je me suis mise à aider les adultes de mon quartier à écrire leur courrier», se souvient Madjiguène Cissé. Lycéenne à Dakar en 1968 dans «un lycée très politisé», elle se passionne pour les événements de mai en France et pour la guerre du Vietnam, qui la poussent à devenir militante.

Arrivée à Paris à 45 ans pour aider sa fille aînée qui entre à la fac, Madjiguène apprend le 18 mars 1996 que des centaines de sans-papiers africains (sénégalaiset maliens pour la plupart) occupent une église parisienne. Dès le lendemain, elle leur rend visite, se joint à leur occupation et devient leur porte-parole. Elle qui ne devait rester que quelques jours à Paris va prolonger son séjour jusqu'à la fin de cette lutte, quatre ans plus tard !

Une longue période, pleine de rebondissements, dont elle se souvient encore, quatorze ans après, de toutes les dates. Les sans-papiers seront chassés par la police de différents lieux, du gymnase Japy à l'église Saint-Bernard. Certaines célébrités (de l'actrice Emmanuelle Béart au professeur Albert Jacquard) sont à leurs côtés et viennent même dormir avec eux !
«Le courage de ne pas abandonner a permis aux sans-papiers de se faire entendre par les Français et de montrer qu'ils n'étaient pas des touristes ou des voleurs comme on les qualifiait», explique-t-elle. Au lendemain de leur dernière expulsion, tous seront régularisés...sauf certains leaders comme Madjiguène elle-même.

En 2000, elle choisit de revenir au pays. Aujourd'hui, elle continue à militer au sein du REFDAF, le Réseau des femmes pour le développement durable en Afrique.

Objectif : accompagner les femmes par la formation et la sensibilisation, sur la question de leurs droits, la santé, la politique... jusqu'à ce que certaines deviennent même chefs d'entreprise.
Très impliquée dans l'organisation du Forum social mondial de Dakar, en février 2011, Madjiguène croit que les initiatives de solidarité internationale peuvent construire un vrai contrepouvoir : «Les peuples n'ont pas assez conscience de leur force. Pourtant les dirigeants politiques en ont peur».

« Nous privilégions le travail en profondeur, dans une perspective de développement durable. Notre priorité, c’est la lutte contre la pauvreté et les inégalités qui frappent les femmes dans les sociétés africaines. Nous avons commencé par un état des lieux en matière d’éducation, de formation, de sensibilisation et l’information. En effet, on nous parle d’égalité, de droits, mais ça veut rien dire sans ce préalable : savoir lire, écrire, prendre des notes, faire des comptes rendus, utiliser un ordinateur, conduire une réunion de façon constructive. Pour que le mouvement existe et s’étende, il fallait en passer par là. Après seulement, nous avons commencé à , élaborer et conduire des projets.

La Cité des femmes de Dakar est un projet qui nous tient particulièrement à cœur. Il s’agit d’un projet d’habitat pour les femmes les plus démunies. Le premier droit est celui d’avoir un toit, et les femmes nous ont très vite interpellé(e)s sur ce sujet, parce qu’elles sont complètement dépendantes des hommes en matière de logement. En s’organisant en réseau, sur un mode coopératif, elles étaient en mesure d’épargner au moins des petites sommes et voulaient investir dans un projet d’habitat.
En décembre 2002, 325 femmes avaient déjà cotisé 500 000 francs. La société des HLM de Dakar a accepté de leur vendre des terrains viabilisés et chacune possède l’apport nécessaire pour acheter son lot. Mais il leur manque de l’argent pour construire, et nous avons pensé mettre en œuvre un mouvement de solidarité internationale pour financer le projet, en demandant par exemple, à chaque féministe européenne de donner 10 euros.
Des architectes sont venues d’Allemagne et l’école d’architecture de Sheffield en a fait un projet d’étude pour les étudiants. Nous voudrions mettre en place un réseau solidaire, avec des volontaires qui viendraient construire la cité : des plombières, des peintres, des charpentières issues du monde entier pourraient à la fois contribuer directement et assurer la formation des femmes et de leur famille dans chacun de ces corps de métier. C’est une cité que nous voulons originale, sortant de l’ordinaire. Elle ne s’articule pas autour d’espaces individuels, mais selon une logique collective.Cette cité sera aussi écologique qu'économique, respectueuse des personnes et intelligente en termes de consommation énergétique."

Lire une interview

Et encore

 

Albina du Boisrouvray

Fille unique du comte Guy du Boisrouvray, venue d'un milieu privilégié, Albina s'est affirmée très tôt comme rebelle et militante. Journaliste indépendante (c'est elle qui révéla les circonstances de la mort du Che) puis productrice ("L'important c'est d'aimer", "Les zozos", "Fort Saganne"...), elle va changer radicalement de vie à la mort de son fils unique en 1986, François-Xavier Bagnoud, décédé alors qu'il pilotait l'hélicoptère du Paris-Dakar où se trouvaient Daniel Balavoine et Thierry Sabine.

Elle vend son entreprise de production cinématographique ainsi que les trois quarts de ses biens personnels et s’engage à Médecins du monde aux côtés de Bernard Kouchner avec qui elle partira en mission notamment au Liban.

Elle fonde alors une organisation humanitaire non-gouvernementale, FXB, afin de poursuivre les missions de sauvetage que menait son fils et perpétuer les valeurs de générosité et de compassion qui guidaient sa vie. Elle consacre toute son énergie et sa fortune à la cause des enfants orphelins du sida à travers le monde et créé les villages modèles FXB qu'elle adaptera dans le monde entier.

Extrait vidéo

 

"J'ai eu François quand j'étais très, très jeune. Je faisais du journalisme, j'ai arrêté parce que je me suis aperçue que le journalisme que j'aimais faire était dangereux, de guerre, et que je n'allais pas survivre très longtemps. Je voulais le voir grandir et il avait besoin de moi.

Les politiques, les gens élus ne font pas ce pour quoi les gens les ont élus. Ils ont des responsabilités et devraient avoir un engagement. Ils devraient mettre tout leur temps, leurs connaissances, leur travail, leur pouvoir pour améliorer le sort des gens dont ils sont responsables et essayer de résoudre leurs problèmes.

Il faut donner du pouvoir aux femmes, il faut parler des choses qui sont taboues. Il faut informer. Il faut inclure dans la société les groupes au lieu de les exclure.

 

Site de l'association FXB (François-Xavier Bagnoud)

 

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